FAITES CONNAISSANCE AVEC L'ARTISTE
NOVOA 

 

Né en 1919 à Pontevedra (Espagne), Leopoldo Novoa a vécu en Uruguay et en Argentine de 1938 à 1961, date à laquelle il s'installa à Paris. Actuellement, il partage son temps entre la capitale et un vaste atelier en Espagne à Armenteira, en Galice.

 

Depuis 1953 plus de cent expositions personnelles, souvent dans des lieux prestigieux, l'ont fait connaître dans une bonne partie du monde (Uruguay, Argentine, USA, Irlande, Espagne, Belgique, Afrique du Sud, Italie, Allemagne, France, Hollande, Pérou, Colombie, Equateur... Ses oeuvres sont présentes dans une trentaine de musées et grandes fondations, en particulier au Musée d'Art Moderne de Montevideo, à ceux de La Chaux-de-Fonds, de New-York, de Dublin, Mexico, Caracas, Ostende, Vigo, Buesnos-Ayres, Lund, La Corona, Santander, Vigo..., Fonds National d'Art Contemporain et Bibliothèque Nationale à Paris. Novoa a réalisé une dizaine d'oeuvres monumentales dont un mural de 600 m2 pour le Stade Cero à Montevideo, une importante sculpture pour le Parc Olympique de Séoul et "La Canterra", un mural de 2000 m2 à La Corogne, en Espagne.

 

Peintre de la matière, du relief, des crevasses et des déchirements, des tensions et des expansions, Novoa se meut dans un monde minéral et de terre où mystère et rêverie naissent sous les jeux impalpables de la lumière. Une présence est là, cachée, inconnue, indiscernable, mais bien réelle. Peinture mystique? Novoa est un artiste espagnol, incontestablement, et de la grande lignée.

 

C'est Michel Tapié qui, lors d'un voyage en Amérique du Sud, le "découvrit" pour nous autres, européens. Voici le récit de cette rencontre: "J'ai connu Novoa lors d'un voyage en Amérique du Sud en 1964, sur les chantiers du Stadium del Cerro où il finissait d'exécuter un étrange et immense mural de quelque cent cinquante mètres de long sur huit mètres de haut sur la paroi extérieure du stade visible de la route adjacente. J'ai été très impressionné par ce travail hors mesure, mais parfaitement intégré rayonnant d'une qualité proche de celle des tableaux d'Antoni Tàpies, d'Enrico Donati, et de quelques autres peintres de haute qualité que je groupais alors sous le titre de "métaphysique de la matière". Il s'agissait d'une oeuvre parfaitement homogène dans sa mystérieuse monumentalité, ayant artistiquement dépassé tous les pièges du "fonctionnel", du "pragmatisme" et autres faux problèmes vis-à-vis de l'art appliqué à l'architecture. Par le contact avec cette seule oeuvre, Novoa s'imposait pour moi comme un artiste d'une exceptionnelle envergure, en profondeur, en force, en qualité, en rayonnement d'enchantement essentiellement artistique." (Michel Tapié. XX° SIECLE. 1971)

 

 

"... Et que fait d'autre, Leopoldo Novoa, sinon de concrétiser dans ses tableaux si déconcertants - ni peintures ni reliefs ou peintures et reliefs à la fois - tout ce travail élémentaire de l'imagination matérielle, de l'imagination naturelle?

Déconcertants comme peuvent l'être des fragments d'immensité. Mais d'immensité localisable. Pour moi qui considère ces tableaux depuis tant d'années, dans l'atelier monacal du Parc de Nogent ou à Armenteira, en Galice, ce Finistère du continent eurasiatique, toute l'oeuvre de Novoa, méditation et rêverie, se constitue en relation, j'allais dire en dialogue, avec l'Atlantique, la mer ouverte, la mer celte.

Je sais bien que celte est une façon de parler qui perd de sa pertinence à mesure que l'on connaît mieux l'antiquité non méditerranéenne de l'Europe. Mais il y a pour nous tout un ensemble de valeurs sensibles liées au fantasme celte sur la rive extrême occidentale de l'Europe: l'art de Novoa en paraît nourri, pénétré. Voici un Celte du mystère, des lointains cosmiques, de l'infini...

Novoa est de ces créateurs modernes qui montrent que tout matériau, toute matière peuvent être élevés à la dignité artistique, devenir supports de communication esthétique et conceptuelle, réceptacles d'identité expressive. En cela, il est plus et mieux l'héritier des vieux alchimistes que celui des peintres et sculpteurs, ses prédécesseurs immédiats. Novoa est un artiste de la transmutation...

Dans son atelier, Novoa vit en ascète, avec ce renoncement au luxe et à l'abondance, à la variété et à la sensualité qui est l'une des constantes de la mystique espagnole, et qu'on trouve tout autant par exemple chez Tàpies. Mais Novoa est galicien: entre lui et le catalan Tàpies, il y a parallélisme, c'est-à-dire non rencontre. L'oeuvre de Tàpies est fermée, refermée sur des symboles culturels très forts: les traces humaines sont là, pétrifiées. Novoa, lui, s'est retiré du monde des signes et des hommes: il a fait profession d'humilité. Et l'humilité, c'est vivre au plus près de la terre, de l'humus. Novoa trouve sa richesse dans la pauvreté. Mais pauvreté qui est invocation à la lumière..." (Jean-Clarence Lambert. CIMAISE n°214. 1991)